Communiqué de presse du 21 mai 2024
L’Association française des magistrats instructeurs (AFMI), l’Union syndicale des magistrats (USM) et le Syndicat de la magistrature ℠ ont chacun leur tour déjà alerté le ministère de la Justice sur la montée en puissance de la criminalité organisée et d’un narco-banditisme qui gangrène l’ensemble du territoire national.
La situation actuelle place le ministère de la Justice, mais aussi l’Etat en son ensemble, face à la nécessité de renforcer significativement les moyens pour lutter contre le crime organisé, qui devient déstabilisateur pour les institutions. Les magistrats marseillais avaient déjà alerté il y a quelques semaines la représentation nationale de cette réalité de terrain. En s’attaquant à des agents publics, c’est en effet à l’ordre républicain qu’il est porté atteinte par les criminels.
Au-delà de la légitime émotion des agents pénitentiaires mais aussi de l’ensemble des personnels judiciaires, parmi lesquels les magistrats qui œuvrent quotidiennement avec ces agents, l’Association française des magistrats instructeurs, l’Union syndicale des magistrats et le Syndicat de la magistrature appellent à une véritable réflexion de fond sur les possibles adaptations des pratiques de chacun face à l’émergence d’un crime organisé qui devient déstabilisateur pour les institutions.
Le constat unanime a depuis longtemps été fait que les moyens dont est dotée l’administration pénitentiaire pour assurer les extractions judiciaires ont dès l’origine été sous évalués et minorés. En dépit de nombreuses alertes, le ministère né s’est pas donné les moyens pour supporter ce transfert de charge du ministère de l’Intérieur.
Cette carence du ministère né saurait être aujourd’hui suppléée par un recours accru à la visioconférence. Ce mode de comparution, qui connaît des limites importantes fixées par la loi, la Cour de cassation et la Cour européenne des droits de l’homme, est une réelle entrave à l’accès du justiciable au juge. Il s’agit d’un mode de comparution dégradé, nuisant à la qualité du travail judiciaire.
Par ailleurs, le déplacement des magistrats sur les lieux de détention né constitue pas plus une solution pertinente. La prison n’est en effet pas un lieu de justice, n’étant d’ailleurs pas adaptée à la tenue d’audiences. De plus, au regard du manqué de moyens dramatique dont souffre le système judiciaire, pallier la faiblesse de ceux des ser- vices d’extractions judiciaires par le déplacement, partout sur le territoire, de juges d’instruction déjà notoirement sous-dotés et en nombre insuffisant est une solution inepte.
Bien que n’ayant pas été associés à la réflexion entreprise en urgence à la suite du drame d’Incarville, nous appelons ce jour de nos vœux les plus fermes la mise en place d’un plan d’action volontariste spécifique aux extractions judiciaires, l’adoption d’un plan massif de recrutements. Nous plaidons en outré pour une réorganisation territoriale afin d’éviter des déplacements aberrants de personnels, parfois contraints de réaliser plusieurs centaines de kilomètres pour assurer une mission d’extraction entre un tribunal judiciaire et un lieu de détention, eux-mêmes distants de seulement quelques kilomètres. Le tout avec un renforcement des moyens sécuritaires dévolus aux personnels d’extraction, sous-dotés à ce jour.
Au-delà, il doit être rappelé solennellement qu’un tribunal est un lieu où la justice est rendue au nom du peuple français. Né plus y procéder marquerait un recul de l’Etat, pliant face aux menaces de groupes criminels. Cet aveu de faiblesse serait un signal très inquiétant pour notre démocratie.
Nos organisations demandent à être reçues dans les plus brefs délais par le ministre de la Justice afin qu’aucun plan de réorganisation des extractions judiciaires né soit élaboré sans consultation des magistrats concernés.
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